On a découvert en fréquentant le Motocross que parmi les enfants (de 9 à 12 suivant les mercredis) 4 d’entre eux étaient HP (et je soupçonne au moins un des petits de l’être aussi). Les enfants HP – hauts potentiels – ont la particularité d’avoir un cerveau qui tourne vite. Suivant les enfants, cela peut faire des bêtes scolaires (tout leur est facile et ils s’ennuient vite) ou au contraire des enfants en échec scolaire (difficulté à s’organiser, à se maitriser, à s’intéresser, ennui trop grand) suivant comment leurs troubles de l’attention et leur hyperactivité perturbent leur développement. Leur maturité émotionnelle a également un impact sur leur comportement. Ils seront plus ou moins à l’aise en groupe et sauront plus ou moins bien gérer la frustration.
Ces enfants, j’ai appris à les reconnaitre. Presque toujours, je les attire (jamais compris pourquoi). Ils sont curieux, intéressés, insatiables, impertinents et tiennent des conversations que l’on pourrait avoir entre adultes. Je les repère probablement parce que Lisa est comme ça et que l’on a pris l’habitude (et le plaisir) de vivre jouter avec.
J’ai discuté avec les parents de ces enfants et tous m’ont dit la même chose: la moto les aide. Que ce soit le facteur motivant ou l’apport de la pratique, tous y trouvent leur compte.
La concentration
Cela les met dans un mode où la concentration est nécessaire mais surtout dans un mode où les effets de la déconcentration sont immédiatement visibles (ils adorent le côté direct du feedback).
Le dépassement de soi
Le fait d’être HP n’apporte aucun avantage dans la pratique de la moto (voire les pénalise même). Si ils se baladent à l’école, ici il doit apprendre à se dépasser. C’est physique, tactique, ludique, pas intellectuel. Ils sont en terrain neutre en quelque sorte et cela a un caractère motivant.
Echec et gestion de la frustration
Ils vont chuter, rater. Il y aura des personnes plus rapides, plus performantes. Mais comme le but de ces cours n’est pas la compétition mais l’apprentissage, les gamins sont encouragés à échouer, refaire. Tu tombes, tu remontes. Et comme les conditions de terrain ne sont jamais identiques (la terre est parfois trop sèche, trop lourde, humide, fait des ornières…) ils redécouvrent à chaque session.
Esprit d’équipe
L’équipe du Mercredi, de par sa petite taille et la régularité de fréquentation, a permis à ces enfants de lier de solides liens. Ici on fait attention aux autres. Pas question de continuer si un camarade est tombé à terre. On les entraine à s’aider. Et ils le font spontanément. La sécurité est la préoccupation principale ainsi que la discipline. Cela structure le groupe et le rend très fort.
Gestions des émotions
Ils apprennent à dompter leur égo et à mettre l’autre au centre de leurs préoccupations. Et la reconnaissance des enfants qui se sont relevés grâce à l’un d’entre eux, leur donne un puissant sentiment de fierté et de satisfaction. Et parce que tout change à chaque session, ils apprennent aussi à dompter leur impatience et leur frustration. Je trouve les valeurs de la moto très proches des valeurs du rugby: respect, sens de l’effort, solidarité… Et ça c’est très structurant pour eux.
Diminution de l’hyperactivité et de la dispersion
Le cours est intense. En l’espace de 3 heures, ils font 4 sessions de 15 minutes. Chaque pause est l’occasion d’un debrief et d’une recharge de leurs batteries (on organise le goûter pour qu’ils récupèrent). Ces courtes périodes de concentrations suivies de quart d’heure de relaxation, correspondent exactement au rythme qu’ils aiment: intense, rapide, exigeant. A la fin des cours, ils sont calmes et heureux. Ils ont pu se dépenser sans se griller pour autant.
Confiance en soi
Cela n’est pas évident pour tous les enfants car c’est une variable qui dépend de l’histoire du gamin. Mais comme dans l’ensemble ce sont des gamins battants et volontaires, ils trouvent rapidement des gratifications à leurs efforts. Ils se rendent compte de leurs progrès facilement. Et comme c’est un sport que peu d’enfants pratiquent, cela contribue beaucoup à les valoriser auprès de leurs camarades.
Les deux années précédentes, nous devions faire faire une activité sportive quotidienne à Lisa pour dompter son surplus d’énergie. Depuis qu’elle a commencé la moto, elle arrive bien mieux à moduler ce besoin. Elle a grandit aussi, ce qui l’aide à mieux gérer ses émotions.
Maintenant que les enfants ont goûté à ce sport, il est devenu indispensable. Ce que Lisa préfère, c’est qu’elle est une des seules filles et que ses camarades de jeu ne la ramènent pas sans cesse à ça: c’est une motarde comme eux.
Si vous avez un enfant HP, je vous recommande d’explorer ce genre d’activité. Pour Lisa, ça a été magique.
Lisa, ainsi que ces camarades sont membres du CPRP, centre de pilotage Romand à Moudon. L’équipe encadrante accueille toutes sortes d’enfants, y compris des enfants handicapés. La très grande variété des enfants et l’exigence de la discipline qui met tout le monde au même niveau contribue beaucoup au succès qui est le leur.